Vagabondage bio en Haute-Savoie

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Un livre de 250 pages écrit par Virginie Heitz et Pauline Vignoud sur les nombreux acteurs bio de la Haute-Savoie sous la forme d'un livre guide vous donnant l'envie de rencontrer les 43 portraits... A consulter sans modération.

Retrouvez ici quelques extraits du livres.

Edité par Alpes Contrôles

Sommaire

- Acheter le livre
- Gaec Fougère reblochons, tommes et bravades
- L’appétit vient en cuisinant
- L’heure bio vivement midi !
- Le mythe de la croissance illimitée
- Jean-François Prieur au Bouquet Savoyard la mesure est un art
- Christine Viron la Bio D’ici ou la stratégie du colibri
- La finance solidaire : financer sans spéculer
- Christelle Crochet fraîcheur, conseils et système D
- Aurélie Philibert met la main à la patte...
- Le grand enjeu de la semence
- Guillaume Bodin nous confie La Clef des Terroirs
- Florent et Stéphane Héritier deux frères, deux productions, une philosophie…
- Brasserie du Léman la belle mousse du bio
- Note de l’éditeur

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Cette page ne propose que des extraits du livre "Vagabondage bio en Haute-Savoie", pour en avoir plus vous le retrouverez dans de nombreux points de vente au prix de 15€:
http://www.alpes-controles.fr/actualites/53-vagabondage-bio-en-haute-savoie.html

Ainsi qu'à la FNAC: www.fnac.com

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Gaec Fougère reblochons, tommes et bravades (pages 24-25)

gaec-fougereMonter au village du Mont en empruntant le col du Marais par beau temps est un délice qui vous enchante l’âme. Puis tomber sur deux vaches effrontées aux yeux de biches, coursées par un chien dynamite, est très rafraichissant! C’est cela d’aller à la rencontre de toute l’équipe du Gaec Fougère : une petite épopée électrisante aimantée par des humanités très avenantes.

La densité énergétique d’une femme vraie. Passionnée. Haletante. Evelyne Gerfaux a commencé par les chèvres comme technicienne au syndicat caprin il y a trente ans : « J’aime les chèvres parce que c’est léger… Et moi je suis légère ! ». Puis vinrent dans sa vie André… et ses vaches, plus lourdes à manœuvrer « Comme leur propriétaire ! » fuse-t-elle. Cette dame au rire et à l’esprit pointus dépote : « Mon problème a été de convaincre mes associés de passer en bio. Mon mari en premier. Je lui ai dit qu’il ne perdrait pas d’argent, mais qu’il ne gagnerait pas un centime de plus… C’est typiquement masculin, les ommes ça n’aime pas s’embêter ! » Reprise balle au centre par André, calme et souriant: « C’est facile, c’est moi qui fait les soins aux bêtes ! Mais c’est vrai, c’est plus intéressant même si c’est plus de travail ».

Lorsqu’une vache marche légèrement de travers ou se couche bizarrement, on s’inquiète et on tâte. Et si jamais les connaissances en interne ne suffisent pas, le téléphone sue à grosses gouttes. Evelyne Gerfaux, qui a suivi pour ses bêtes une formation en ostéopathie proposée par l’Association pour le Développement de l’Agriculture Biologique (ADABio), a développé en France un solide réseau. Et même si, en tant que « technicienne », elle transmet son savoir à André sans appliquer elle-même la recette, on n’imagine pas cette femme choisir une solution antibiotique sans se creuser d’abord la cervelle et solliciter d’avisés conseils : « En médecine humaine on soigne la maladie et pas la personne. C’est pareil avec les animaux ! Il faut avoir la fibre. Les soins sont plus longs… Mais elle est contente la vache qu’on s’occupe d’elle ! »

Volubile, l’abeille de ce Gaec tient à mettre en avant une équipe riche en personnalités. Gérard Fournier, son frère, en fait partie depuis 1993. Il garde les génisses chez lui à Villars-sur-Thônes, produit une partie du foin qu’il remonte ensuite au Mont et s’occupe, botté de blanc, à la fabrication des fromages. Curieux et précis, il analyse posément le créneau bio : « On réussit si on connait bien son troupeau et si on n’est pas trop intensifs (…) On est deux fermes à fabriquer du reblochon bio fermier. Sur 160 c’est peu. Le reblochon fermier se valorise déjà bien donc ça ne bouge pas. La certification ce n’est jamais gagné. Les contrôles, très stricts. On s’est mis en bio car l’exploitation s’y prêtait ».

L’équipe, même si elle est partie d’une base saine héritée des anciens Gerfaux et Fournier, s’est convertie au bio pendant longtemps. Aujourd’hui la succession s’annonce. Le fils d’Evelyne et André se porte volontaire. Bruno, titulaire d’un bac agricole, sera bientôt prêt même si l’enseignement, selon sa bouillonnante maman, pèche : « En bac pro il y a des modules d’agriculture durable. Mais à l’examen ce sont des matières techniques pures et dures ! Ce ne sont pas les profs qui sont productivistes, c’est le système ! ». Pendant ce temps Philippe Chollet, l’autre acteur du Gaec Fougère, emballe consciencieusement de beaux reblochons. Ingénieur agronome, ce Suisse pince sans rire au verbe fin est l’autre espoir d’une transmission réussie. Après une formation de 6 mois à Poisy en certificat de spécialisation conduite d’un élevage laitier, son stage au Gaec Fougère s’est mué en projet d’association. Il doit l’intégrer au terme d’une année d’essai. Cet homme qui a su changer de cap, souhaite amener dans la structure un peu d’agrotourisme : qui dit mieux qu’un accueil vache ?

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Gaec Fougère, Le Mont, 74230 Serraval. Tel : 04 50 27 51 43

Tomme, reblochon, tomme blanche, jus de pomme

Où et quand trouver leurs produits ?
Sur place en appelant avant pour réserver la tomme blanche
En Haute Savoie dans les magasins bios du réseau Aquarius (Annecy, Pringy, La Roche-sur-Foron ; voir notre sujet),
le réseau Satoriz. Le magasin La Source d’Annecy, 49 rue Gambetta, 74000 Annecy


L’appétit vient en cuisinant (pages 38-39)

L’agriculture productiviste, comme nous le développons dans d’autres chapitres de cet ouvrage, pollue les eaux des nappes phréatiques et des rivières, stérilise les sols, signe la ruine de la qualité et de la diversité des paysages et la fin des paysans, mais elle met aussi en péril un trait culturel propre à toute société humaine et particulièrement cher à la France : sa cuisine. En standardisant les denrées alimentaires, on a standardisé la cuisine et on lui a fait perdre sa « saveur locale ». Bernard Charbonneau le souligne d’ailleurs très justement dans son livre Un festin pour Tantale : « La fin de la cuisine commence dans le panier et sur le fourneau de la ménagère avec la transformation de ses éléments par l’agrochimie. Le fruit de la terre devenant produit d’usine, le matériau n’est plus le même.»1

En effet, depuis les années cinquante, on a appliqué de force le taylorisme dans l’agriculture2. Nos aliments sont produits de manière similaire aux voitures, c’est-à-dire à la chaîne, le plus rapidement possible et de manière standardisée. On parle d’ailleurs fort justement de l’industrie agroalimentaire. Il est possible d’acheter des tomates fraîches mais sans saveur en toute saison, les poulets sont calibrés en fonction de leur taille, ceux qui ne passent pas le test étant jetés à la poubelle. Les variétés de fruits et légumes considérées comme non rentables ou ne répondant pas aux règles édictées par le marketing alimentaire sont absentes des étals.

Le paroxysme de la standardisation culinaire a été atteint avec la mise sur le marché de plats préparés. Le matraquage publicitaire nous persuade que le progrès consiste à cuisiner le plus rapidement possible et au moindre coût. Il ringardise les recettes de famille qui se transmettaient de génération en génération au profit de la world cuisine dont les tacos, sushis, paellas et autres plats supposément préparés par de grands chefs étoilés, se vendent sous vide ou congelés. Le congélateur et l’indispensable four à micro-onde permettent de cesser de cuisiner une bonne fois pour toutes à la maison, mais aussi dans les cuisines des restaurants où les industriels du surgelé ont remplacé les chefs et rempli des cartes longues comme des jours sans pain.

La publicité nous vend ces appareils et les plats préparés au nom de la libération de la femme; il suffirait de les acheter pour balayer des siècles de machisme et de corvées culinaires ! C’est oublier que l’égalité des sexes passe par le partage des tâches ménagères et non par leur hypothétique disparition. En réalité, cette fausse « libération » a surtout bénéficié à l’industrie agroalimentaire, qui a pu ainsi développer toute une ligne de plats préparés, surgelés et autres conserves industrielles. La conversion de nos aliments en produits manufacturés est totale : « pour maîtriser les caprices du marché des produits agricoles il faut maîtriser le temps : généraliser la conserve qui permet de stocker, d’échapper aux aléas des jours et des saisons. Saupoudrés de chimie, patates et carottes, beurre ou lait, pourront supporter le transport et attendre des jours meilleurs»3. Ainsi, le consommateur a perdu tout contrôle sur ces produits, il achète ce qu’on veut bien lui vendre et certains ingrédients qu’il ne voit pas : du sucre, de la graisse et du sel accompagné d’un cocktail explosif de conservateurs, exhausteurs de goût, épaississants, émulsifiants, acidifiants, stabilisants et autres produits chimiques de synthèse désignés par des codes mystérieux.

On en viendrait à oublier que manger n’est pas seulement une nécessité, mais un plaisir plus grand quand il est partagé. Oubliée la fierté du jardinier qui fait goûter ses légumes, oubliée la complicité présente dans la transmission intergénérationnelle des savoir-faire culinaires, oubliée l’odeur des petits plats mijotés qu’aucun parfum de synthèse ne saurait remplacer, oubliée encore la petite pointe d’orgueil que l’on sent monter en nous quand, après quelques heures d’activité devant les fourneaux, se font entendre les premiers compliments des convives.

Pourtant, produire ou sélectionner les meilleurs aliments est le plus sûr moyen de vous assurer de leur fraîcheur, de leur qualité et de relever d’autant le goût et l’arôme de votre cuisine. Cuisiner n’est pas un acte automatique et préétabli ; l’invention, l’expérimentation, le mariage fin des saveurs, des couleurs et des textures constituent les indispensables composantes d’une cuisine et de plats réjouissants.

Cuisiner permet aussi de contrôler ce que l’on mange plus sûrement qu’en s’abîmant les yeux à essayer de déchiffrer les listes d’ingrédients au dos des emballages des produits industriels. Cuisiner c’est offrir aux autres un peu d’affection, du temps et beaucoup de plaisirs. La cuisine est un lieu de socialisation, d’échanges et d’apprentissages.

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(1) Charbonneau, Bernard, Un festin pour Tantale, Nourriture et société industrielle, Paris, Edition Sang de la Terre, 2011, p.113.
(2) Voir article sur les Politiques Agricoles en France depuis 1950. [chapitre 3]
(3) Charbonneau, Bernard, ibid., p.114


L’heure bio vivement midi ! (pages 52-53)

l-heure-biol-heure-bio-annecyComme jailli d’une pupille à épices, son regard noisette jette de petits charbons ardents dans l’olympe de Pascale Chapuis. Ayant franchi le cap qui mène des soins esthétiques à la restauration éthique - avec le concours de Marc Larebière, son compagnon - la maîtresse des fourneaux du restaurant l’Heure Bio est une heureuse reconvertie. Bio, en revanche, elle l’est depuis toujours grâce à sa maman, attentive au contenu de l’assiette de ses enfants. Car maman à son tour – et mamie depuis – Pascale Chapuis a simplement adapté une table familiale chère à son cœur… Reste qu’une alimentation bio embellit plus sûrement et durablement qu’un soin cabine!  

Né en janvier 2010, cet établissement intimiste et tonique illustre des problématiques fréquentes à la pratique du bio en salle. Car si la carte privilégie les légumes de saisons locaux (fournis par les Jardins de Taillefer depuis Lathuile), elle s’autorise certains produits lointains issus du commerce équitable, comme la céréale Fonio d’Afrique Occidentale. Auquel cas entre en scène la filière de magasins bios Satoriz : s’offrir quelque exotisme, d’accord. Mais garantir sa traçabilité et le respect des cultivateurs d’abord. Avec pour impératifs la santé, l’éthique et bien sûr, la saveur des plats…

Concernée par les problèmes humains et environnementaux qu’engendre une trop grande consommation de viande, Pascale Chapuis se soucie d’équilibrer les assiettes. On trouve du poulet certains jours et du poisson, le vendredi. Mais la cuisinière préfère les protéines végétales et jette son dévolu sur les graines et les céréales: « Mes clients me disent souvent qu’ils aiment repartir nourris et jamais lourds » se réjouit-elle. On retrouve la fibre maternelle au cœur du soin qu’elle apporte à ses plats : « C’est un lien fort de nourrir les gens, et chaque jour une remise en question.»

Mehdi, qui travaille avec Pascale Chapuis, a découvert une toute autre façon de cuisiner, notamment les desserts. De nouvelles questions et préoccupations se font jour chez lui comme parmi la clientèle, qui de très féminine, s’est ouverte aux palais d’hommes souvent entraînés par leur moitié. Trouver le point de convergence entre gourmandise et conscience semble guider la quête de Pascale Chapuis, qui est elle-même le meilleur argument pour donner envie de goûter à sa cuisine fine.

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L’heure Bio
8 Passage des Bains, Place des Cordeliers
74000 Annecy. Tel : 04 50 09 12 43
Ouvert du mardi au dimanche à partir de 9h
- www.lheurebio.net


Le mythe de la croissance illimitée (pages 68-69)

En 2011, l’Oscar du meilleur documentaire a été décerné au film Inside Job, réalisé par Charles Ferguson et narré par le célèbre acteur Matt Damon. Selon son directeur, ce film montre « la corruption systématique des Etats-Unis par l’industrie financière et les conséquences de cette corruption1 ». Il explique d’une manière très détaillée les relations entre le monde de la finance et celui de la politique, les conflits d’intérêt et le va-et-vient des experts entre cabinets gouvernementaux, conseils d’administration des grandes firmes et universités. C’est sous ce jour peu connu qu’est présentée et expliquée la crise des subprimes qui continue à faire des ravages dans l’économie mondiale. La dérégulation des marchés financiers a conduit les ménages à qui l’on permettait de s’endetter au-delà du raisonnable2, à l’insolvabilité et à la perte de tous leurs biens, entrainant la faillite de certaines institutions bancaires et la crise économique mondiale.

Ce que ne souligne pas le documentaire, c’est que le débridage du crédit à la consommation était également poussé par deux objectifs : la compensation de la baisse continue des salaires depuis le début de la globalisation financière (qui a entrainé la délocalisation d’une large part des emplois) et surtout la recherche d’une croissance économique élevée. En effet, le crédit est indispensable à la croissance. Si les travailleurs ne dépensaient que ce qu’ils gagnaient, d’où proviendrait la croissance de la production ? L’argent tournerait sur lui-même dans une économie en cercle fermé. L’injection « d’argent frais » est indispensable à la croissance économique mondiale. Dans son livre, La prospérité sans croissance3, Tim Jackson se réfère au financier Georges Soros pour en témoigner : « Dans Le nouveau paradigme des marchés financiers4, Georges Soros attribue l’émergence sur les marchés financiers mondiaux de ce qu’il appelle une « super-bulle » à une série de politiques économiques destinées à augmenter les liquidités comme moyen de stimuler la demande. L’assouplissement des contraintes pesant sur la réserve fédérale américaine, la dérégulation des marchés financiers et l’encouragement de la titrisation des créances par le biais de dérivés financiers complexes procèdent d’interventions délibérées. L’encouragement de la croissance économique était leur objectif primordial.5 »

L’objectif forcené d’une croissance économique la plus forte possible que se sont imposé les états dans leur grande majorité, est en train de nous mener au désastre. D’abord parce qu’elle engendre un certain niveau de développement des crises répétées, ensuite parce qu’elle est loin de remplir son objectif d’apporter le plein emploi et la prospérité. A titre d’exemple, la jeune génération européenne actuelle est la première dont le niveau de vie sera inférieur à celui de ses parents. Pourtant, en cinquante ans, hors 1974 et 1994, la croissance française, bien que faible après les trente glorieuses s’est toujours maintenue.

Le mythe de la croissance repose sur la croyance en un monde infini toujours plus opulent, permettant à l’homme d’accumuler toujours plus, de consommer toujours plus, jouissant en conséquence de toujours plus de sécurité et, ainsi plus heureux. C’est limiter l’homme à un consommateur suiveur, fasciné par la nouveauté et dupe face à l’obsolescence programmée des biens qu’il achète. Car la croissance est portée par deux dogmes, celui des besoins illimités, qui en réalité sont créés par une industrie du marketing qui a su parfaitement utiliser la psychologie sociale pour créer de nouveaux besoins et par celui des ressources naturelles infinies. La terre est ronde et finie, les ressources en terres arables, en pétrole, en minerais, en eau, sont des données mal connues mais déterminées. Le productivisme et le consumérisme sont une fuite en avant de l’humanité vers un futur incertain, et à coup sûr fait d’épuisement de ressources indispensables à la survie des espèces terrestres dont nous faisons partie.

Appliquée à l’agriculture, cette politique de croissance de la production en dépit de ses coûts environnementaux est une aberration. Il est urgent de se défaire d’un mythe mortifère qui somme toute n’a que trois siècles d’histoire, (beaucoup moins que de nombreuses sociétés humaines) et qui conduira à l’extinction de la nôtre si nous ne le remplaçons pas par la recherche d’un avenir plus sobre, plus vertueux et plus solidaire.

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(1) Interview filmée de Charles Ferguson par Charlie Rose. (Consulté le 18 septembre 2011). Charlie Rose Interviews Charles Ferguson on his documentary‘Inside Job’. [En ligne]. Adresse URL : www.youtube.com/watch?v=vS0hj4kiqsA
(2) L’endettement moyen des ménages américains comparé au revenu disponible atteignait en moyenne 140% en 2010 selon les chiffres du journal du net. (Consulté le 18 septembre 2011). Les ménages ont dépensé sans compter. [En ligne]. Adresse URL : www.journaldunet.com/economie/magazine/dossier/dette-deficit-croissance-les-etats-unis-sont-ils-en-faillite/les-menages-ont-depense-sans-compter.shtml
(3) Jackson, Tim, La prospérité sans croissance, Bruxelles, De Boeck, 2010.
(4) Soros, Georges, The New Paradigm for Financial Market. The credit crisi of 2008 and what it means, Londres, Public Affaire, 2008, p.81 et suivantes.
(5) Jackson, Tim, La prospérité sans croissance, Bruxelles, De Boeck, 2010, p.44.


Jean-François Prieur au Bouquet Savoyard la mesure est un art (pages 86-87)

jean-francois-prieur« On n’est pas des militants » : le ton est donné, avec gentillesse et retenue mais clairement quand même. Jean-François Prieur est un homme affable. Son visage arbore l’humble sourire aux contours légers des grands timides. Il diffuse aussi l’assurance toute discrète des introvertis. Eux qui savent mieux que personne où ils veulent aller et où… pas du tout. De fait, le passage au bio du Gaec Le Bouquet Savoyard et sa forme, ont été pensés puis menés dans le calme et la stratégie de l’instinct. Celui qui préserve, louvoie à vue sans filouterie et fraie son juste chemin entre nécessités et lois.  

Associé à sa femme Agnès et à Marie-Claude Gaillard, Jean-François souhaitait ne travailler ni seul, ni uniquement en couple : « pour pouvoir partir en vacances et prendre un dimanche de temps en temps». Et oui, même respectueux de la nature, le maraîchage n’est pas une religion et la vie hors serre existe bel et bien. Pour Jean-François Prieur, le passage au bio pouvait d’ailleurs s’envisager uniquement s’il était associé à une mécanisation moderne des cultures. Il le dit ouvertement : « on n’utilise aucun pesticide mais plus de fuel ». Une réflexion qui en invite une autre : si les fabricants de machines agricoles avançaient sur le terrain des engins sains, quel bel avenir pour le bio ! Car la technique, la recherche et le modernisme sont, en particulier pour les maraîchers productifs, indissociables d’une agriculture naturelle. « On a acheté une planteuse, une bineuse et standardisé les cultures (…) On ne détruit pas l’herbe, on l’empêche de pousser. Maitriser notre planning est presque aussi important que ce qui se passe dans le champ».

De fait, quatre ans avant le passage au bio initié il y a deux ans (effectif fin mars 2012), Jean-François Prieur sollicitera l’ADABio pour un diagnostic de ses pratiques. La terre parle : il en faut peu pour une bascule. Désireuse d’avancer sereinement en prenant de l’assurance, l’équipe partage ses cultures en deux pendant 24 mois, pour voir. Les unes sont menées à l’ancienne, les autres selon des techniques naturelles. Le résultat est probant. Certaines parcelles produisent mieux et plus abondamment sans engrais chimiques ni pesticides. L’expérience est riche aussi du point de vue humain : « En cherchant une solution on en trouvait une autre. Cela nous a rendu curieux. C’est super motivant. On ne s’y attendait pas ». La conversion peut alors officiellement s’enclencher.

En 2008, la terre, dont Jean-François Prieur a hérité de son père, n’arrive plus à absorber l’eau. Cette année diluvienne fait dire aux différents observateurs du sol qu’il manque cruellement d’aération. Aussi, la proximité du lac laisse penser aux associés qu’il serait bon d’en préserver la pureté. Si possible en lui évitant les infiltrations de chimies acides. Où l’on reconnaît cet équilibre humain louable, entre le souci de soi et celui du plus grand nombre, y compris ceux qui viendront plus tard.

A côté des 2,5 hectares de légumes poussent sur 3000 m² des fleurs destinées aux amoureux, aux restaurateurs et aux décorateurs également férus de bouquets. Impossible de passer en bio cette partie de terrain : les dahlias, tulipes, anémones, renoncules, giroflées et autres lisiatus n’ont pas de bulbes produits dans les conditions adéquates. Dommage, car la terre des fleurs serait bien utile aux légumes pour tourner… Jean-François Prieur, qui cherche une solution, constate auprès des fleuristes que l’inconséquence prévaut. Tant pis si les roses sont cultivées en Afrique au détriment des ressources en eau et du respect de la main d’œuvre. Tant pis aussi si les mains des ouvriers agricoles manipulent des tiges imbibées de produits néfastes à leur propre santé et celle de leurs clients. La fleur est un domaine encore vierge pour le bio. Pas militants, mais acteurs, Jean-François Prieur et ses associées défrichent – l’air de rien – une nouvelle parcelle des agricultures naturelles.

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Gaec Le Bouquet Savoyard
Prieur-Drevon Agnès, Prieur Jean-François, Gaillard Marie-Claude
3245 route d’Albertville, 74320, Sevrier. Tel/fax : 04 50 52 48 49
Ouverture : lundi et jeudi de 16h à 19h, toute l’année.
[voir annuaire n°17]
Un petit marché d’une quinzaine de producteurs locaux s’est créé naturellement devant le bâtiment du Gaec, selon le calendrier ci-dessus. Tous ne sont pas bios mais artisanaux et fermiers (Glaces au lait de la ferme, volailles, fromages, miel, pain, veau de lait, truite, escargots, porc, vin)


Christine Viron la Bio D’ici ou la stratégie du colibri (pages 92-93)

christine-vironC’est un menu bureau de femmes niché au sein d’une entreprise de transports située à Chambéry. Une fois franchis les couloirs perlés de testostérone, l’accueil y est frais, direct, émaillé de rires cristallins. L’atmosphère s’électrise à la veille des vacances de la Toussaint. Christine Viron et Jacqueline s’affairent : il faut prévoir la livraison de crèmes vanille, anticiper la rentrée prochaine des cantines scolaires. La Bio d’Ici, plateforme d’approvisionnement de produits bios locaux pour la restauration collective, sévit avec bonheur depuis près d’un an sur les deux Savoie. Favoriser l’accès à une alimentation saine pour tous en préservant le tissu agricole et l’emploi en région est sa mission. Christine Viron, présidente bénévole et co-fondatrice de l’association, est d’une nature énergique. Telle l’eau vive qui vous jaillit en cadeau, au détour d’un chemin, un jour de canicule. « Les producteurs et les collectivités ont beaucoup de mal à se rencontrer. Il y a des tonnes de papiers à produire et de contraintes difficiles à tenir pour la production bio ». Une problématique qu’elle prend à bras le corps de façon énergique. Christine Viron est devenue une activiste de l’alimentation saine au fil d’un parcours inattendu, qui a marqué son destin : « J’ai commencé comme directrice marketing dans la malbouffe au sein d’un grand groupe alimentaire, mais j’y ai beaucoup appris. J’ai ensuite fait 8 ans en grande distribution alimentaire dans le groupe Casino. J’ai été directement confrontée à la crise de la vache folle, aux OGM. A l’époque, j’ai développé la marque Casino Bio. C’était embryonnaire par rapport à mon engagement d’aujourd’hui ».

Cette belle flamme a franchi des cols vertigineux pour en arriver à La Bio d’Ici. Lorsque son mari, responsable des achats en grande distribution, devient guide naturaliste alpin, la jeune femme entame une révolution intérieure : « Je ne pouvais plus faire de marketing comme avant. J’ai enchaîné sur un master Ethique et Développement Durable en fac de philo à Lyon III. Ce fut une année très riche en questionnements, en réflexions ». Et comme les destinées choyées aiment les encouragements, sa route croise celle de Botanic [voir chapitre 4]. Le réseau de magasins de jardinage fait tout juste le choix radical de supprimer les engrais chimiques et les pesticides de sa gamme. Christine Viron en devient la Directrice du Développement Durable : « C’était une décision courageuse de la direction et une très bonne expérience ».

Puis, parce que son fils mange mal à l’école, la fibre maternelle et la capacité d’indignation de Christine Viron tricotent avec pep’s une singulière étoffe. Associée à Jean-Marc Riva, son ancien collègue à Botanic, la jeune femme s’inspire d’Auvergne Bio pour construire une plateforme jumelle. Ainsi naquit La Bio d’Ici. «Les goûts et les dégoûts se jouent très jeune. Je connais trop bien les mécanismes marketing, le rouleau compresseur des marchés et celui de la grande distribution. On privilégie les intérêts des firmes au détriment de la santé des enfants (…). Puis en bio, Il faut plus cuisiner, ça demande plus d’anticipation. Et certaines collectivités sont tombées très bas quant au prix de l’assiette» observe-t-elle vivement. Cependant, il est des chefs cuisiniers ouverts aux changements. Et les collectivités locales cèdent devant des arguments de poids. Vaut-il mieux investir pour la santé des jeunes ou dans la réfection d’un vestiaire de foot ? Grâce à ses talents marketings, Christine Viron saisit les arguments chocs qui débloquent les consciences. Et les budgets… Aujourd’hui, La Bio d’Ici emploie deux contrats aidés sénior; Jacqueline, assistante et André, réceptionnaire-préparateur de commandes. L’Association assure l’interface entre les producteurs bios locaux et une cinquantaine de restaurants scolaires, d’hôpitaux et d’entreprises. « On a mis au point des menus et une offre construite». Les collectivités savent donc où elles vont. Lorsqu’on lui demande d’où vient sa force de conviction, la conteuse entre en scène : « La stratégie du colibri part d’une légende amérindienne. Un feu ravage la forêt. Au lieu de fuir le colibri s’affaire à l’éteindre avec ses petits moyens : Je sais que je ne peux rien faire seul, mais je fais ma part ». A y regarder de plus près, de jolies petites ailes frétillent dans le dos de Christine Viron, femme l’engagement et d’action.

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La Bio d’Ici
Plateforme logistique, c/o TFE Alpes,
1200 avenue de la Houille Blanche, 73000 Chambéry
Tel : 04 79 71 06 05 - labiodici.fr


La finance solidaire : financer sans spéculer (pages 116-117)

Les banques traditionnelles sont depuis le début de la crise économique de 2008 dans l’œil du cyclone. Elles sont accusées de tous les maux et sans doute à juste raison. Dès septembre 2008, René Ricol rendait au Président Nicolas Sarkozy un rapport pointant la responsabilité des banques dans la crise économique qui, à l’époque, venait d’éclater : « Les facteurs clés, à l’origine de cette crise ou qui ont créé les conditions de son développement, sont aujourd’hui reconnus : une liquidité excessive, une large dérégulation dans certains domaines, des retours sur fonds propres dans le secteur financier sans lien avec les rendements de l’économie réelle et des lacunes dans la gestion des risques au sein des banques.1 »  De plus, les banques, en préférant la spéculation et les effets de mode à l’investissement de long terme créateur de richesse, ont fortement limité le développement de certains secteurs qui, bien que porteurs d’emplois ne pouvaient leur rapporter les taux de profit qu’elles imposaient2.

Pourtant, un système d’épargne permettant l’investissement est indispensable pour le développement de l’économie. Le rôle des établissements financiers est la collecte de l’épargne des ménages pour la réaffecter sous forme de prêts à des entreprises ayant besoin d’apports financiers pour investir et se développer. Il est donc indispensable pour la santé de l’économie que les ménages investissent leur épargne dans des projets porteurs d’avenir et d’emploi et non que cette épargne serve à la spéculation au détriment des entreprises ou des Etats.

La finance solidaire s’inscrit en opposition totale aux pratiques du système bancaire international. Finansol, le label de la finance solidaire la définit ainsi : « Face à un système financier traditionnel dans lequel l’épargne des citoyens est trop souvent investie de manière opaque dans des projets dont le seul objectif est la rentabilité maximale, la finance solidaire affirme sa différence en replaçant l’Homme au cœur du mécanisme. L’argent n’est plus considéré comme une fin en soi mais bien comme un outil à mettre au service de projets citoyens.3 » En 2010, les encours de l’épargne solidaire atteignaient en France un peu plus de trois milliards d’euros4. Ce secteur est un des rares à ne pas connaître la crise et permet la création d’emplois, de logements sociaux, le développement des pays du Sud et de l’Est et le développement de projets environnementaux.

L’accès au financement de l’investissement est un problème récurrent pour des porteurs de projet dans l’agriculture biologique, le prix des terres n’étant pas en adéquation avec les revenus attendus. Les terres sont également accaparées par l’agriculture conventionnelle à la recherche d’exploitations toujours plus étendues pour rentabiliser des investissements et des coûts fixes importants. C’est pour pallier à cette situation qui freine le développement de ce type d’agriculture qu’a été créée en 2006 l’association Terre de Liens. Celle-ci fait appel à l’épargne privée pour acheter des terres ou des exploitations agricoles et les louer à des producteurs bios. Il est possible d’acquérir des actions de la foncière Terre de Liens pour 100 euros. Cette épargne peut être retirée à tout moment par l’investisseur, pour un montant indexé sur l’inflation sans perception de dividendes. Terre de Liens permet donc de placer son argent sans le perdre ni s’enrichir à partir du travail d’autres acteurs, et ainsi de respecter la valeur du travail, l’homme et l’environnement au travers d’un compromis permettant de développer le secteur de l’agriculture biologique, créateur d’emplois et non polluant.

Investir ainsi son épargne permet de participer à la création d’emplois pour des producteurs bios, qui, sans l’association, n’auraient pas pu accéder aux moyens de financement classiques ; cet investissement limite la disparition de surfaces agricoles5 ou de fermes, favorise le développement de l’agriculture biologique et diminue les importations de produits bio dans la mesure où le pays pourvoit à la demande interne; il permet par ailleurs d’obtenir des avantages fiscaux pour les investisseurs6 et de garantir leur épargne.

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(1) Ricol, René, Rapport sur la crise financière, ed. Présidence de la République, Paris, Septembre 2008, p.10.
(2) Voir Lordon, Frédéric, Jusqu’à quand ? Pour en finir avec les crises financières, Editions raisons d’agir, Paris, 2008.
(3) Finansol, (consulté le 21 octobre 2011), Le secteur. Adresse URL : www.finansol.org/UPLOAD/rubrique/pages/77/77_rubrique.php
(4) Finansol, (consulté le 21 octobre 2011), Quelques chiffres. Adresse URL : www.finansol.org/UPLOAD/rubrique/pages/94/94_rubrique.php
(5) L’équivalent d’un département français tous les dix ans.
(6) Soit une réduction de l’impôt sur le revenu de 25% du montant souscrit (loi Madelin), ou une réduction
de l’impôt de solidarité sur la fortune de 75% du montant souscrit, éventuellement plafonné (loi TEPA).
Attention : les actions doivent être conservées pendant au moins 5 ans et ne pas donner lieu à d’autres avantages fiscaux.


Christelle Crochet fraîcheur, conseils et système D (pages 124-125)

christelle-crochetDynamisme et féminité : L’Eau Vive d’Annecy est bien-nommée. Christelle Crochet, sa toute jeune responsable, a l’âge de cette chaine de magasins bios créée elle aussi en 1979. 32 ans donc. C’est un signe ! Fraîche et spontanée, elle est une de ces natures à fleur de peau, hyper volontaire, qui vous accueille sans chichis. Très bien maquillée mais pas trop, son sourire resplendit. On s’installe dans le petit bureau ouvert du côté four à pain en arrière-boutique. Il y a du passage et beaucoup d’activité.

« On se débrouille pas mal ici, il faut tous les jours être au sommet de sa forme ! Beaucoup de caisses lourdes à porter, le contrôle des délais de consommation tôt le matin, le pain à cuire chaque jour… On ne s’ennuie jamais ! ». Le boulot est exigeant mais on ne sent chez Christelle Crochet ni plainte ni reproche.  

Au contraire, l’esprit d’entreprise et l’autonomie relative du magasin motivent une équipe de choc : Concetta, Catherine, Isabelle, Mélia et… Jordan. Le garçon de la bande, un petit dernier de 21 ans, vit sa première année à l’Eau Vive. Le groupe semble aussi soudé et professionnel que possible. «Ici , il faut être polyvalent et en éveil. Il y a des formations internes à tout moment de l’année. C’est gratifiant de bien connaitre ses produits et de savoir conseiller les clients ». De fait, Concetta et Mélia sont spécialistes en diététique. Catherine, qui a œuvré 20 ans chez Marionnaud, s’est formée à la cosmétique bio. Une révélation. Il est vrai que les produits naturels ont gagné en séduction. Et puis, une seule crème adaptée aux cheveux, au visage, au corps : le soin de beauté prend une tournure à la fois plus saine et plus économique.

Quant à Christelle, ayant repris un temps l’exploitation familiale de vaches laitières aux côtés de sa sœur – encore une affaire de femmes ! – cette fille d’agriculteurs connaît bien le travail de la terre et les animaux fermiers.  « J’étais dans les pieds de mon père ! J’ai tout fait. J’étais déjà sensible aux produits biologiques, même si notre exploitation ne l’était pas (…), parfois j’ai envie de dire aux gens qui manipulent les légumes sans égard de respecter le travail des producteurs! ». Courageuse et dure à la tâche, la jeune femme a dû renoncer à l’agriculture car elle n’avait littéralement plus les épaules. Un nid de douleur physique commença à la tourmenter dès ses vingt ans à cet endroit précis : « C’est un mal pour un bien. J’aime le commerce. J’aime les produits et on me fait confiance ».

Embauchée comme employée de magasin il y a deux ans, la jeune femme semble douée pour l’escalade professionnelle. Le sens relationnel joue pour beaucoup : « Je suis contente de mon équipe. Je suis carrée et respectueuse. Tout le monde est très avenant avec moi ». Le fait est que ça se voit.

Le magasin L’Eau Vive d’Annecy compte environ 5000 références en roulement. En principe, la direction privilégie les producteurs locaux, mais la gérante doit batailler, pour des raisons logistiques, afin d’en compter parmi ses fournisseurs. Répondre à l’exigence qualitative est une chose, honorer en sus une demande quantitative complique la donne. Car le magasin croît. La clientèle du quartier se convertit peu à peu au bio. Les caddies pleins remplacent le timide panier de dépannage. « Lorsque le magasin a ouvert, il fallait laisser le temps aux clients de s’approprier les différents produits. Depuis, une sélection a été réalisée pour laisser la place à des nouveautés » précise Christelle qui ajoute : « Quand les gens tombent malades, ils se retranchent vers les magasins bios. Nous avons des clients souffrant de cancer devant qui nous nous sentons parfois démunis. On fait de notre mieux et ça les réconforte un peu ». Un vrai métier de service, de contact humain et de proximité.

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L’Eau Vive
4 avenue des Romains, 74000 Annecy
Tel : 04 50 57 17 56
www.eau-vive.com


Aurélie Philibert met la main à la patte… (pages 170-171)

aurelie-philibertVoilà une jolie jeune femme brune au regard franc, les traits nets. Elle m’accueille dans la rue, en civil, juste après le pont qui coupe Seyssel en deux. Une fois à l’abri, la magie opère : une simple blouse blanche et la soignante apparaît ! Son cabinet aux tons pastel est dépouillé, humble, agréable. Un unique tableau affiche la morphologie osseuse et nerveuse du chien. Ici, pas de chichi mais de la conviction, de la confiance en soi. Aurélie Philibert hisse ses espoirs avec la passion du métier sans celle de l’argent, considéré comme le simple outil qu’il est. Son ambition est de pratiquer à foison sa discipline chérie, fruit d’aiguillages successifs.

Un praticien débutant doit faire montre d’une grande patience pour vivre un jour de son art. L’ostéopathie animalière... Force est de se demander comment on y vient. Surprise ! Pour ceux qui en douteraient, les belles mamans ne sont pas forcément des enquiquineuses. Celle d’Aurélie Philibert, fine mouche, lui a même suggéré ce métier. Ce sera donc après une fac de biologie, une formation d’auxiliaire vétérinaire et de judicieux conseils que s’ouvrira la juste voie. Aurélie Philibert termine sa formation d’ostéopathe pour animaux en Suisse en 2009. Elle travaille aussi en animalerie pour se financer. Même si la profession est reconnue depuis juillet 2011, cela n’empêche pas la jeune femme d’exercer encore une activité annexe. Toutefois, grâce à une conjoncture des esprits toujours plus favorable et un bouche à oreille louangeur, sa clientèle croît. Soucieuse de ne pas énerver la profession vétérinaire, Aurélie Philibert fait néanmoins profil bas: « Des vétérinaires me prêtent leur cabinet. Mais je reste discrète, je n’ai pas envie que ma carrière s’arrête là. C’est un métier passion ».

Aurélie Philibert vit de ses mains. Légèrement osseuses, fines, douées pour le contact et la traque des encombrements du corps, capables de soulager, défaire les nœuds, rétablir les échanges, fluides et nerveux. Ces mains s’agitent lors du dialogue comme pour mieux en saisir ou en délier le propos. Elles captent l’attention - la tension - et s’expriment, volubiles. Pour un peu, on prétexterait une subite - même subtile - fragilité lombaire (voire un cousinage canin lointain !), dans le but de tester les fluides bienfaisants du bout de ces doigts : « Je fais confiance à mes mains. En apprenant à sentir avec elles, j’ai compris que l’on sous-estime nos sens. On devrait tous être formés au corps. C’est une autoroute où un bouchon bouche tout avec des conséquences partout (…) Un ostéopathe peut stimuler l’immunité, lubrifier les articulations. Il faut juste avoir la volonté et le savoir. C’est tellement simple ». On s’y mettrait presque et derechef ! N’empêche, il faut une sacrée dose d’empathie et de courage pour palper la douleur des animaux, eux qui ne parlent pas : « J’ai beaucoup exercé à la SPA de Bellegarde, en bénévolat. Je le fais encore. Le chat m’a appris sur tous les autres animaux. Il faut prendre du recul. Une fois qu’on a réussi à canaliser l’animal on peut passer au soin en essayant de voir plus loin que le symptôme, pour trouver autre chose que le médicament ».

Cette démarche active et attentive épouse le caractère fonceur de la fée soignante, qui aime à être entourée de ses propres animaux : un chien, des chats, un cheval, un rat. « On vit dans un monde matérialiste. Moi, j’ai envie de me battre. Les gens qui acceptent tout sans réagir, par routine, ça me fait déprimer (…) Il faut que je fasse les choses et je préfère les faire bien ». En deux années d’exercice la jeune ostéopathe a eu l’occasion de revoir des maîtres et des patients satisfaits de leur nouvel état de santé, d’apporter des solutions simples en lieu et place d’opérations lourdes. Elle ne cesse de développer sa pratique, de l’affiner sur les animaux de compagnie, de la ferme et sur les chevaux. « Bio ou pas, les jeunes agriculteurs sont plus sensibles. Dans un élevage, il ne faut pas attendre que les vaches soient malades. Pour la saillie, il peut y avoir un décalage de lombaire. On peut intervenir » affirme-t-elle. Qu’on se le dise, Aurélie Philibert a inventé « l’ostéopapattie », une pratique où l’âme agit.

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Aurélie Philibert
Ostéopathe pour animaux (consultation sur RDV, se déplace aussi)
Quai Serrulaz, 01 420 Seyssel. Tel : 06 01 73 35 79

Ostéopathie équine, canine et féline en région Rhône Alpes et sur le Bassin genevois
Savoie (73), Haute-Savoie (74), Ain (01), Pays de Gex
www.osteopapatte.fr -

Merci à Ulna et sa maîtresse Mme Girod de s’être prêtées au jeu des photos


Le grand enjeu de la semence (pages 202-203)

« La semence, c’est le début de la chaîne alimentaire. Celui qui contrôle la semence, contrôle la chaîne alimentaire et donc contrôle les peuples ». La mise en garde du site de l’association Kokopelli1, dont la raison d’être est d’assurer la préservation des ressources génétiques dans le domaine alimentaire, est claire.

Au premier abord, prendre le contrôle des semences ne semble pas facile ; elles sont présentes dans nos aliments, une par prune par exemple, des dizaines par tomate ou par melon, sans compter les pommes de terre qui ont plusieurs modes de reproduction. Pourtant, pour nos paysans, ce geste si simple qui permet à l’homme depuis des milliers d’années de sélectionner et replanter les meilleures graines de la récolte passée, vient d’être interdit par la législation française. En effet, une loi vient d’être votée au Parlement obligeant les paysans utilisant des semences de la récolte précédente, à payer une redevance aux semenciers détenteurs d’un certificat d’obtention végétale (COV), sorte de droit de propriété sur la plante cultivée. Selon le texte de loi, cette rémunération permettrait que soit « poursuivi le financement des efforts de recherche et que les ressources génétiques continuent d’être améliorées2 ». En somme, les agriculteurs devront directement financer la recherche privée sur les semences. Selon un article du quotidien Le Monde présentant la nouvelle loi : « Entre cette taxe et l’interdiction de ressemer ses propres graines, l’agriculteur est de plus en plus incité, non plus à produire mais à acheter ses semences3 ».

Pourtant, produire et sélectionner les graines permet d’améliorer la qualité d’une espèce et de l’adapter au climat et aux conditions locales. Or, les semenciers standardisent les graines utilisées pour l’agriculture comme on le fait pour des produits industriels. Cela permet une garantie de productivité dans le temps et si possible quel que soit le milieu. A condition que ce milieu corresponde aux critères des stations expérimentales dans lesquelles ont été mises au point les variétés. Pour cela, il sera nécessaire « d’artificialiser le sol en utilisant d’importantes quantités d’engrais et en ayant recours à des techniques de mécanisation et d’irrigation intensive. L’uniformité des semences impose ainsi une uniformisation des pratiques agricoles »4 comme l’indiquent les auteurs du livre Labo planète ou comment 2030 se prépare sans les citoyens. Ajoutons également la nécessaire utilisation systématique de pesticides et fongicides. Les semenciers gagneront sur tous les tableaux car les plus importants d’entre eux au niveau mondial, Monsanto, DuPont, Syngenta, sont tous trois également producteurs de produits chimiques destinés notamment à l’usage agricole.

Cependant, les semenciers n’ont pas encore totalement gagné la bataille pour le contrôle des semences en France. Aux Etats-Unis, c’est chose faite car la législation en vigueur Outre Atlantique donne le droit de breveter les organismes vivants et notamment les plantes. Selon l’association les Amis de la Terre, les firmes de semenciers « déposent des brevets sur des procédés et les appliquent aux ressources vivantes dont elles prennent le contrôle et verrouillent la commercialisation. Dans ce système, la semence en tant que premier maillon de la filière, est particulièrement visée »5.

Cette mainmise sur la production des semences conjuguée aux autres pratiques agricoles et au marketing de la grande distribution érode la biodiversité. Ainsi, « on estime que 80% des légumes cultivés il y a 50 ans ont disparu »6. De même, les espèces de blé et de céréales cultivées en France ne représentent plus qu’une infime proportion de celles anciennement cultivées et toutes adaptées aux différents terroirs. La privatisation rampante des ressources agricoles entraîne de fait une dépendance économique toujours plus importante des agriculteurs aux firmes de l’agro-business et uniformise leur production. Elle est donc doublement dangereuse pour la sécurité alimentaire de la planète et pour la biodiversité, de même qu’elle incite toujours plus à l’utilisation de pesticides et engrais chimiques dangereux pour l’environnement. Les peuples sont en train de perdre leur sécurité alimentaire et la maîtrise de l’avenir de l’humanité et de la planète au profit de l’enrichissement des firmes de semenciers.

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(1) Toute information sur l’association est disponible sur son site internet : www.kokopelli.asso.fr
(2) Cité dans Bolis, Angela, Pour les agriculteurs, ressemer sa propre récolte sera interdit ou taxé, Le Monde du 29 novembre 2011.
(3) Ibid.
(4) Jacques Testart, Agnès Sinaï, Catherine Bourgain, Labo planète ou comment 2030 se prépare sans les citoyens, éditions Mille et une nuits, p.78
(5) Brevet sur les semences, Paysans sous dépendance, Les Amis de la Terre, Paris, 2003, p. 13
(6) Jacques Testart, Ibid., p.74


Guillaume Bodin nous confie La Clef des Terroirs (pages 214-215)

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Haut-Savoyard et féru d'alpinisme, il est accessoirement guide de montagne et skie comme d'aucuns courent au vent. Piqué des vignes dès l'enfance, devenu adulte diplômé dans le domaine viticole et oenologue, il s'est inventé lors d'un voyage austral un nouveau métier, celui de réalisateur, avec un certain talent. Il, c'est Guillaume Bodin, petit Bouddha blond au visage d'ange, palais redoutable et regard tranquille. De ceux qui mènent leur destin avec insouciance mêlée d'assurance.

C'est un jeune homme très occupé et pourtant disponible qui, entre deux trains, brave sa hantise de la ville pour m'accorder un entretien dans un café annécien. Guillaume Bodin prend le temps de parler de ce qu'il aime. C'est d'ailleurs toute la démarche de son film: La Clef des Terroirs. Où l'on fait connaissance de vignerons ayant choisi les pratiques naturelles afin de donner le meilleur de leur activité passion. Une dizaine d'entre eux l'ont accueilli avec sa caméra pendant quelques heures ou semaines, parfois sur plusieurs mois. Des personnages touchants et intelligents, amis proches du réalisateur tels les sympathiques frêres Bret du domaine de la Soufrandière dans le Mâconnais, ou d'autres rencontres prestigieuses, comme Aubert de Villaine, gérant du domaine Romanée-Conti - Côtes de Nuits. Devant la caméra de Guillaume Bodin, ces acteurs des rangs et des caves partagent leurs réflexions, leur approche et leur amour du terroir par le biais de la biodynamie, c'est-à-dire la compréhension de la dynamique du vivant. Un courant inspiré de pratiques millénaires et conceptualisé par Rudolf Steiner, philosophe, scientifique et architecte, sollicité au début du siècle dernier par des paysans désemparés face à l'apparition de l'agriculture industrielle. Un concept méconnu et décrié par les praticiens de la chimie: «La crédibilité d'un grand domaine comme celui d'Aubert de Villaine, qui passe au bio, met un grand coup de pied dans la fourmilière. Lui était convaincu de ses bienfait depuis le début, sans communiquer dessus. Il a d'abord passé 7 ha sur 25 en bio, pour voir. Cela lui a permis de convaincre les ouvriers du domaine. Entre 2008 et 2009, il l'a passé en bio totalement. J'étais surpris qu'un homme comme lui m'ouvre ses portes si facilement».

Outre les vignerons, tous singuliers, étonnants et unanimement prompts à s'exprimer, le film enrichit d'une bonne approche pédagogique grâce aux interventions de Pierre Masson, conseiller et historien en biodynamie, ou celle de l'agronome Dominique Massenot, grâce à qui la structure des sols et leurs besoins naturels semblent limpides. Grâce à des images léchées et sincères, parfois magnifiques, un casting et un montage justes, le film construit tranquillement son harmonie. La Clef des Terroirs nous invite à pénétrer son univers avec simplicité. Le réalisateur et les intervenants sont guidés par le désir de transmission: «Ces gens intelligents sont passionnés. Ce ne sont pas des bouseux. Je me souviens de profs au collège me disant d'aller dans l'enseignement général... Je souhaite simplement dire aux jeunes que c'est un beau métier.» Le réalisateur projette un éclairage direct, doux et complet, sur des domaines capables de tirer de la terre un nectar ancré dans notre culture, hédoniste et judéo-chrétienne. Rappelant au passage que ce sont les moines qui plantèrent les vignes pour le vin de messe.

Ce que le film ne permet pas, en revanche, c'est de vivre sa première dégustation de vins en cours de fermentation. Pour cela, il faut être dans les bons papiers d'un vigneron ou simplement très curieux. Aux côtés de Guillaume Bodin, c'est une initiation privilégiée. Pour un novice, témoigner d'une telle finesse dans le ressenti et l'analyse de vins en cours de maturation, leur présent, leur potentiel, leurs avenirs, est assez énigmatique, voire fascinant. C'est le terroir lui-même et la personnalité du vigneron qui s'expriment: «Il n'y a pas de recette. Sur une même appellation, deux personnes vont faire deux vins très différents. La différence dans le goût du vin, c'est la fermentation qui permet de retrouver le goût du terroir. La vigne pousse dans les minéraux. Un vin raconte une histoire en biodynamie d'une manière forte. Philippe Héritier [voir même chapitre] essaie de faire des vins qui parlent aussi bien que lui. D'ailleurs, ils se passent de discours». Un bon vin est une arme suprême contre l'uniformisation du goût, car il est une symbiose parfaite entre l'humain et la terre, organisme vivant.

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Guillaume Bodin

www.universditvin.com
www.laclefdesterroirs.com
La Clef des Terroirs est sorti en mars 2011, désormais disponible en DVD.


Florent et Stéphane Héritier deux frères, deux productions, une philosophie… (pages 216-217)

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Dotée de parfum, cette page diffuserait un savoureux mélange de prêle, d’origan et de Belle des prés. Après les avoir cueillies dans les niches herbeuses, Florent Héritier utilise ces plantes en tisane, comme élixir de beauté pour ses vignes. Autant de soins aromatiques stratégiques, qui adoucissent les effets délétères du cuivre présent dans la bouillie bordelaise. A ce jour, le seul fongicide efficace connus contre certains champignons :  «Il existe des trucs à redécouvrir. Peut-être un mélange d’huiles essentielles. C’est à nous de trouver », affirme, volontaire, le jeune vigneron.

Cet enfant du pays s’est lancé dans la culture des vignes et la production de vin en 2004, après des études idoines qui néanmoins ne pipaient mot sur les alternatives au tout chimique. « J’en avais marre d’utiliser des produits pas naturels. Je ne me sentais jamais propre, même après une douche » confie-t-il. Désormais au faîte d’un élan salutaire pour lui, pour la terre et les amateurs de son vin, Florent Héritier tient le discours d’un homme épanoui dans son métier : « J’ai quelques contraintes de plus, mais je ne dirais pas que c’est difficile car je suis plus heureux».

La terre, elle, semble bien réagir aux délicates attentions de son serviteur, qui préfère l’aérer d’une griffe plutôt que de la gaver de fertilisateurs :  «Quand les racines descendent on gagne l’âge que les vignes n’ont pas».

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Ce choix du bio, Stéphane, son frère, l’a aussi fait en 2010. S’ils ont chacun leurs vignes et leurs productions, l’un et l’autre vinifient dans les mêmes locaux et mettent en commun leurs efforts pour réussir leur conversion. Membre de l’Association de Formation Collective à la Gestion (AFOCC), ce « vigneron paysan », tel qu’il se présente – infirmier à mi-temps – apprend la comptabilité et rencontre d’autres exploitants bios autonomes : « Prendre la gestion de la vigne dans son ensemble me remplit. Il faut être près d’elle, attentif. Cela demande des efforts très positifs, agréables à fournir. Et j’aime le contact avec les collègues, les échanges sont plus forts » explique-t-il.

Tous deux récompensés, l’un d’une médaille d’argent et le second de deux médailles d’or, Florent et Stéphane Héritier sont confiants : « Les résultats de nos travaux sont satisfaisants pour l’instant (…). De plus, la filière bio est relativement organisée. Il y a 25 ans, ce n’était pas le même débat » s’accordent- ils à penser. Issue d’une famille viticole par un oncle, la fratrie Héritier creuse depuis Frangy le sol des anciens pour y excaver des savoir-faire oubliés. Fiers de montrer leurs cuves où peu de manipulations se font, et les tonneaux de bois, où ils laissent le jus de raisin blanc libre de fermenter. Pour voir.

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Florent Héritier
160 route d’Annecy - 74270 Frangy
Tel : 04 50 44 52 56 - www.vin-savoie-heritier.fr
[voir annuaire n°22]

Stéphane Héritier
Chef-lieu - 74270 Clermont
Tel : 04 50 69 66 45 –
Roussette de Savoie cru Frangy - Roussette de Savoie - Méthode traditionnelle « brut » - Rosé - Mondeuse - Gamay


Brasserie du Léman la belle mousse du bio (pages 230-231)

florent-aubertFlorent Aubert est un garçon sourcilleux au regard aiguisé. Il se renseigne abondamment sur la démarche du présent ouvrage et ses motivations. Convaincu, il se livre ensuite avec bonhommie. Créateur de La Brasserie du Léman, ce Nancéen d’origine s’est installé en Haute-Savoie « par hasard ». Ingénieur en génie des procédés, pétrochimie, il souhaitait avoir sa propre activité et aimait l’univers de la bière, son brassage. Le bio est venu en prolongement de ses propres habitudes de vie.

D’abord sans local ni matériel de brassage, Florent Aubert fait fabriquer la bière en Belgique sur la base de ses propres recettes. Son rôle est alors plus commercial, il démarche les bars et les restaurants : « Quand on crée une entreprise, il faut être naïf, persévérant et avoir quelques sous de côté » explique-t-il. Payé pour ses efforts, il trouve un bel endroit tout de bois en 2009 et du matériel d’occasion pour le brassage, mis en route en fin d’année. Laurent Reymonet, ancien gérant d’un bar restaurant de Thonon-les-Bains, prescripteur et client des bières artisanales de la Brasserie du Léman, le rejoint alors.

Dans la vie, les deux associés sont attentifs aux questions d’environnement, de santé et, aux maladies dites de civilisation (ou de malbouffe). La lecture d’articles, le visionnage d’émissions, l’envie de savoir guident les choix de Florent Aubert, qui estime que « les enfants sont le levier du bio. L’entourage devient plus sensible aux problèmes d’allergies ». Dans son domaine, plus adulte, il sélectionne en bio le malte et le houblon, qu’il n’est pas toujours évident de trouver en France. La Suisse Alémanique et les Etats-Unis sont parfois son ultime recours pour un malte bio capable de développer certaines saveurs et une amertume sans l’emploi d’épices.

Un plaisir d’alchimiste qui a sûrement à voir avec son ancienne vie. « On ne met pas forcément en avant l’argument bio. On vend une bonne bière artisanale avec un beau packaging ». En effet, ce dernier est très chic, graphique, sobre et recherché : bien loin des clichés du bio à la typographie mal fagotée, voisine de quelques brins de paille pour faire authentique sur la photo. On est aux antipodes des entreprises employant la communication bio en appliquant par ailleurs les règles de la production industrielle. Ce qui n’empêche pas La Brasserie du Léman de croître, passant de 430 hectolitres en 2011 à 650 hectolitres en 2012. « On ne se paie pas tous les mois, mais on se paie » commente Florent Aubert. Le jeune entrepreneur qui explique sourire en coin que « Le bio ne change pas forcément le goût de la bière, mais un lendemain de cuite est beaucoup moins amer ! », semble néanmoins assez adepte de la sobriété heureuse si chère à Pierre Rabhi. Le projet de changer pour un local plus grand est en route car le réseau se développe tranquillement. Dans l’idéal, les deux associés aimeraient investir dans une éco-construction, un des sujets de prédilection de Laurent Reymonet, qui a lui-même une maison construite selon ce mode. « Malheureusement, c’est hors de prix ». En 2012, il demeure toujours plus compliqué et onéreux de construire en France des bâtiments autonomes, ou économes en énergies polluantes, que de s’abonner pour des millions d’années au nucléaire.

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Brasserie Artisanale du Léman, 600 B route des Blaves, Noyer, 74200 Allinges
www.biere-leman.com
Florent Aubert : 04 50 37 45 83 -
Laurent Reymonet : 04 50 37 45 83 -


Note de l’éditeur

Alpes Contrôles, d’un projet d’entreprise à un projet de société

Tout groupe humain responsable doit, pour assurer sa pérennité, préserver l’intégrité physique et morale des individus qui le composent, se soucier de leur bien-être, parfaire constamment son organisation, et porter beaucoup d’attention à son environnement, cette notion d’environnement étant comprise au sens large. C’est évidemment le cas pour une entreprise. La préservation des individus peut sembler une banalité; pourtant, satisfaire cette exigence est moins facile qu’il paraît, surtout si l’on se préoccupe de la capacité d’implication, ’engagement, d’innovation et de création des individus composant l’entreprise. Se soucier du bien-être des individus et du groupe participe des mêmes préoccupations. Et atteindre des résultats satisfaisants dans ce domaine nécessite pour la direction de l‘entreprise et l’encadrement une attention de tous les instants. Cette préoccupation guide la politique d’Alpes Contrôles depuis sa création en 1988. L’entreprise a mis en place une gouvernance participative qui associe diverses instances de salariés et notamment leurs élus aux prises de décision qui engagent l’avenir de l’entreprise, mais également la vie des salariés et leur rémunération. Ils peuvent exprimer leurs avis grâce aux votes organisés dans les instances où ils sont représentés et qui sont décisionnaires, ou grâce aux référendums organisés et auxquels prennent part tous les salariés.

Cependant, confrontée dans ses métiers à une concurrence exacerbée, la Direction et les salariés n’ont pu que constater qu’une entreprise ne pouvait prétendre être un îlot de bonheur et de prospérité dans un océan de difficultés ou de malheurs. L’entreprise se doit d’agir sur son environnement si elle veut que sa propre situation s’améliore. De cette prise de conscience ont résulté divers engagements dans la société et le monde économique, le lancement de nouvelles activités, une remise en question de l’organisation de l’entreprise et des préoccupations étendues à son environnement général.

En particulier, dans ses nouvelles activités, en plus de celles touchant au conseil et aux contrôles relatifs à l’environnement et aux énergies, Alpes Contrôles a obtenu l’agrément lui permettant d’être organisme certificateur dans le domaine de l’agriculture biologique. La volonté de l’entreprise de ne pas se comporter comme un profiteur du développement durable en intervenant dans ce domaine économique, et de montrer qu’elle s’y engageait par conviction et parce que cette nouvelle activité était porteuse de sens, ont amené Alpes Contrôles à concourir à la promotion de l’agriculture biologique. Vagabondage bio en Haute-Savoie est né de cette volonté et de cette décision. L’entreprise, avec l’accord de ses instances représentatives et l’engagement de son dirigeant, a initié des actions ayant un impact sur la société civile et le monde économique, comme l’organisation du Festival de l’Economie d’Annecy, la participation au Conseil Local de Développement, la Présidence d’Annecy Initiative, structure d’aide à la création et à la reprise d’entreprise et le lancement de l’initiative « Territoire en transition ».

Son engagement dans le bio et la réalisation du présent ouvrage ont fait ressortir une similitude étroite entre le nécessaire souci de préservation des individus dans l’entreprise et la préservation de la nature et de la biodiversité dans l’agriculture. Pour qu’il produise dans les meilleures conditions et avec les meilleurs rendements, un sol doit être entretenu, soigné, enrichi et ne pas être poussé à une variante agricole du burn out comme cela survient avec l’utilisation des engrais et autres produits chimiques de synthèse de l’agriculture productiviste. Il en va de même pour toutes les interférences de l’homme avec la nature, dans les prélèvements qu’il opère ou dans les rejets qu’il lui impose.

La surexploitation du milieu naturel a engendré au cours de l’histoire la disparition de nombreuses civilisations.Une conception linéaire du temps (après nous le déluge !), la dictature du court-terme, l’exigence d’une jouissance immédiate et une croyance aveugle dans le progrès nous mène sur le même chemin que ces sociétés disparues ont emprunté.

En conclusion, se préoccuper des hommes sans se préoccuper de la nature dont ils font partie est une aberration, c’est emprunter un chemin qui, pour l’entreprise mène à sa ruine et pour la société à sa disparition. L’entreprise ne peut donc s’affranchir ni de la société dont elle est partie intégrante de l’organisation, ni de la nature qui l’entoure et dont ses membres font partie. Un projet d’entreprise n’a donc aucun sens s’il n’est pas intégré dans un projet de société. C’est le sens de l’engagement d’Alpes Contrôles dans l’agriculture biologique et dans sa promotion. C’est le sens de cet ouvrage dont nous avons assuré l’écriture et l’édition.

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Mots-clés: vin, agriculture, livre

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Le realisateur de documentaire Guillaume Bodin au domaine de la soufrandiere à vinzelles Guillaume Bodin

Je voulais devenir vigneron en biodynamie mais les traitements chimiques ont tout remis en question. Je me suis reconverti dans le documentaire.

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